La Faculté Economie Management Communication sciencesPo (EMCP) est une Faculté à l'écoute de la personne et ouverte sur le monde. Elle offre des formations dans quatre disciplines majeures, en cours du jour ou en horaire décalé, avec un engagement fort pour l’encadrement et l’accompagnement des étudiants. Elle mène une recherche scientifique d'excellence et interdisciplinaire dans des domaines de pointe. Pour les experts et décideurs de demain ! 

Les études

La Faculté offre des formations de qualité et de proximité insistant sur la rigueur et l'esprit critique au-delà de la connaissance pure. Elle veille à sensibiliser ses futurs experts et décideurs de demain à la responsabilité sociétale, à l'interdisciplinarité et à la dimension internationale. Les programmes de bachelier, de master et de doctorat qu’elle vous propose s’inscrivent dans quatre disciplines majeures :

Etudiants en sciences économiques

Pédagogie : un engagement fort !

La Faculté accorde une importance capitale à l’encadrement et l’accompagnement des étudiants que ce soit en cours du jour ou en horaire décalé. Learning by doing, service learning, hybridation en horaire décalé, … Venez découvrir notre approche pédagogique ainsi que nos différents dispositifs.

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Université et démocratie : un lien vivant, parfois menacé

Paroles d'experts
Démocratie

Méfiance envers les institutions politiques traditionnelles et les élus, montée des logiques autoritaires, définancement des services publics… La démocratie semble aujourd’hui traverser une zone de turbulences. Dans ce contexte, quel rôle l’université joue-t-elle ? Pour éclairer cette question, nous avons rencontré quatre chercheurs issus de disciplines différentes : la pédagogue Sephora Boucenna, le philosophe Louis Carré, le politologue Vincent Jacquet, la juriste Aline Nardi. Leurs regards croisés dessinent les contours d’un enjeu plus que jamais d’actualité : penser et défendre le lien entre université et démocratie.

démocratie-visages

La démocratie n’a rien d’un concept figé. Elle fait débat, surtout aujourd’hui. Louis Carré, directeur du Département de philosophie et membre de l’Espace philosophique de Namur (Institut ESPHIN), en propose une définition en trois dimensions : un régime politique, un état de droit et une manière de faire société.

Le concept de démocratie : entre pouvoir du peuple et centralisation

« Étymologiquement, la démocratie est un régime politique qui consiste à donner le pouvoir au peuple », rappelle-t-il. « Nos démocraties occidentales reposent aujourd’hui sur l’idée que le peuple est souverain, sans pour autant gouverner directement. De là naît une tension entre la démocratie idéale et la démocratie réelle. » Vincent Jacquet, professeur au Département des sciences sociales, politiques et de la communication et président de l’Institut Transitions appuie le propos : « La démocratie est un idéal d’autogouvernement des citoyens, mais il est en tension avec des logiques plus centralisatrices, plus autoritaires. […] Nos systèmes politiques sont traversés par ces différentes tensions, avec à la fois des logiques autoritaires de plus en plus présentes, y compris chez nous, et des logiques de participation qui s’accompagnent parfois de beaucoup d’espoir et de déception aussi. »

Deuxième pilier selon Louis Carré : l’État de droit. La démocratie garantit les droits fondamentaux de tous les citoyens par la constitution. Mais là encore, gare aux paradoxes : « On pourrait en effet imaginer des lois prises par la majorité des représentants ou par un référendum, mais qui contreviennent aux droits fondamentaux », souligne le philosophe. La démocratie ne peut donc se résumer au seul principe majoritaire.

Enfin, la démocratie est également une manière de faire société. Elle repose sur un réel pluralisme : diversité des opinions, des croyances et des valeurs. « Cela suppose l’existence d’un espace public relativement autonome face au pouvoir en place qui, par moment, conteste les décisions prises par les gouvernements qui ont été élus », insiste Louis Carré.

La méfiance des citoyens vis-à-vis du politique n’est, à ce titre, pas nécessairement un symptôme de crise démocratique. Elle peut même en être un signe de vitalité, comme l’explique Vincent Jacquet : « Le fait que les citoyens soient critiques envers leur gouvernement n’est pas forcément négatif parce que, dans une démocratie, les citoyens doivent pouvoir contrôler les actions des gouvernants ».

Photo de Vincent Jacquet
Vincent Jacquet

Former les gouvernants… et les gouvernés

Dans ce contexte, quelle est la responsabilité de l’université ? Louis Carré rappelle d’abord une réalité simple : une grande partie de nos élus sont passés par les bancs de l’université. Mais sa mission d’enseignement ne s’arrête pas là. « Il s’agit de former des citoyens éclairés, pas seulement des gouvernants. Les universités doivent offrir un enseignement supérieur de qualité, ouvert au plus grand nombre », affirme-t-il.

« La démocratie suppose en effet des citoyens capables de débattre, de réfléchir, de problématiser les enjeux », complète Sephora Boucenna, doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation et de la formation et membre de l’Institut de Recherches en Didactiques et Éducation de l’UNamur (IRDENA). Il s’agit donc de former des esprits réflexifs, aptes à interroger leur époque.

Former des enseignants réflexifs, pour des citoyens critiques

L’université forme également ceux qui, demain, éduqueront les générations futures : les enseignants. Et là encore, la démocratie est en jeu.

 « Notre mission est de former des enseignants réflexifs qui, eux-mêmes, apprendront à leurs élèves à penser de manière critique », insiste Sephora Boucenna. Cela passe par un travail en profondeur sur l’analyse de pratiques, la construction collective et l’apprentissage du débat, dès la formation initiale des enseignants jusqu'à leur formation continue. 

Sephora BOUCENNA
Sephora Boucenna

Produire et diffuser du savoir… en toute indépendance

Outre l’enseignement, l’université a également une mission de recherche et de service à la société. Elle produit des savoirs qui peuvent éclairer les politiques publiques, mais aussi les questionner. Cette fonction critique suppose une indépendance réelle vis-à-vis du politique. « Pour analyser avec lucidité les mécanismes démocratiques, y compris ceux que les gouvernements mettent en place, il faut que l’université garde sa liberté de recherche et de parole », souligne Vincent Jacquet.

 

Louis Carré va plus loin : « Comme la presse, l’université est une forme de contre-pouvoir dans l’espace public ». Il précise par ailleurs qu’« il y a une confusion entre liberté d’opinion et liberté académique. Les savoirs universitaires passent par une série de procédures de vérification, d’expérimentation, de discussion au sein de la communauté scientifique. Cela leur donne une robustesse qui n’est pas celle d’une opinion, d’une valeur, d’une croyance. » 

Louis Carré
Louis Carré

Cette fonction critique de l’université suppose donc une indépendance forte. Or, en Belgique, le financement des universités relève largement du pouvoir politique. « Celane doit pas signifier une mise sous tutelle », alerte Louis Carré. « Mener des recherches critiques, qui ne satisfont pas à court terme des commanditaires, demande une indépendance, y compris de moyens. Il faut des chercheurs en nombre qui puissent analyser différents types de dynamiques. Plus on coupera dans les finances de la recherche, comme c’est le cas aujourd’hui, moins on aura de chercheurs et donc de capacité d’analyse indépendante et de diversité des perspectives », insiste Vincent Jacquet.

Le mouvement « Université en colère », récemment lancé au sein des universités de la Fédération Wallonie-Bruxelles, entend dénoncer les effets du définancement. Ses représentants appellent à « garantir les conditions de développement d’une université ouverte, indépendante, de qualité et accessible au plus grand nombre. Face aux défis sociaux, économiques et politiques de notre temps et parce que d’autres choix de société, et donc budgétaires, sont possibles, il est plus que jamais essentiel de renforcer les institutions et les acteurs au cœur de la production du savoir. » 

Entre vigilance et engagement : un lien à réinventer

La démocratie ne se limite donc ni aux élections ni aux institutions. Elle repose sur une vigilance collective, portée par les citoyens, les savoirs… et les lieux où ces savoirs se construisent. À ce titre, l’université apparaît comme un maillon essentiel de la vitalité démocratique. À condition de rester indépendante, accessible et ouverte sur la société.

« La démocratie, ce n’est pas seulement une affaire d’institutions. C’est l’affaire de citoyens qui la font vivre et qui s’organisent pour faire valoir leurs perspectives à différents moments », insiste Vincent Jacquet. Une invitation claire à ne pas rester spectateur, mais à participer, avec lucidité et exigence, à la construction d’un avenir démocratique commun.

Une année académique, placée sous la thématique de la démocratie

Retrouvez le discours prononcé par la Rectrice Annick Castiaux lors de la Cérémonie de rentrée académique 2025-2026.

Discours de la Rectrice à la Cérémonie de rentrée académique 2025-2026

Cet article est tiré de la rubrique "Enjeux" du magazine Omalius #38 (Septembre 2025).

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Enseigner l’esprit critique

Intelligence Artificielle
Étudiants

Art du doute fécond, l’esprit critique s’apprend et s’entretient. Face à la surcharge d’information et au déploiement de l’intelligence artificielle, il est plus que jamais nécessaire pour les étudiants de développer cette faculté tout au long de leur cursus. À l’UNamur, cette nécessité pédagogique se veut protéiforme. 

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Toute pensée qui se forme dans notre conscience est influencée à la fois par des contraintes externes – argument d’autorité, dogmatisme – mais aussi par des contraintes internes – opinions, émotions, suggestions. Faire preuve d’esprit critique est donc toujours d’abord un exercice réflexif, comme l’illustrait déjà Socrate. « À travers la maïeutique, l’art du dialogue, Socrate cherchait à remettre en question ses propres opinions. Il disait : la seule chose que je sais, c’est que je ne sais rien », rappelle Sabina Tortorella, chercheuse en philosophie politique à l’UNamur.  À partir de l’époque des Lumières, cet art de la mise en doute (étymologiquement, « critiquer », qui vient du grec, signifie « discerner ») se conçoit aussi comme la possibilité de faire usage public de la raison. « Dans la conception de Kant, la critique comporte une dimension d’émancipation », développe Sabina Tortorella.  « Elle consiste à sortir d’un état de tutelle, par ailleurs souvent très commode... » Avec Kant émerge aussi l’idée qu’il ne faut pas seulement se méfier du dogmatisme ou de ses émotions, mais de ses propres raisonnements : c’est la raison même qui fait l’objet de la critique. Bien sûr, cette disposition critique n’est pas la responsabilité des seuls individus : elle exige des institutions qui autorisent et encouragent le débat, la discussion, la confrontation.  « L’esprit critique est une attitude, un éthos qui ne peut pas se développer dans n’importe quel contexte », souligne Sabina Tortorella. « C’est pourquoi renforcer l’esprit critique demande d’abord de renforcer les institutions démocratiques. »

Proportionner sa confiance

« L’esprit critique pourrait être défini comme la faculté de proportionner correctement la confiance qu’on accorde à certains discours en fonction de leur qualité intrinsèque », commente Olivier Sartenaer, chargé de cours en philosophie des sciences à l'UNamur. 

Olivier Sartenaer
Olivier Sartenaer

« Autrement dit, si l’on est critique, on doit accorder beaucoup de confiance aux discours fiables et peu ou pas de confiance à ceux qui sont peu fiables. Par exemple, le platisme, qui considère que la terre est plate, peut être considéré comme une théorie peu fiable. Y croire beaucoup, c’est donc faire preuve de peu d’esprit critique. » Paradoxalement, la pensée complotiste revendique pourtant avec virulence son caractère critique, alors que, comme le souligne Sabina Tortorella, « l’esprit critique n’est pas le scepticisme radical. » Cette faculté de proportionner adéquatement sa confiance ne peut d’ailleurs être assimilée à la notion d’intelligence. « Cela relève aussi de dispositions psychosociales », souligne Olivier Sartenaer. « On sait par exemple que le climatoscepticisme est le fait de gens plutôt conservateurs. Concernant des cas extrêmes comme le platisme, on retrouve souvent une souffrance psychosociale, une forme de marginalité. Adhérer au platisme, c’est alors trouver une communauté, un sentiment d’appartenance. Si l’on était dans une société moins violente, plus bienveillante, il y aurait probablement moins d’adhésion à ces théories. »

Un privilège qui oblige 

Car la possibilité d’exercer son esprit critique est aussi une forme de privilège. « La faculté de discernement demande du temps et de l’énergie : c’est un travail qui met en jeu des dispositifs cognitifs assez coûteux », poursuit Olivier Sartenaer. « Tout le monde est capable d’avoir de l’esprit critique, mais s’asseoir et avoir le temps de penser est un luxe inouï », rappelle de son côté Géraldine Mathieu, professeure à la Faculté de droit de l’UNamur. Un luxe qui, selon elle, oblige à une forme d’engagement. « L’esprit critique, c’est aussi critiquer la norme, la loi, la jurisprudence et la combattre quand elle ne nous paraît pas juste », souligne la spécialiste du droit de la jeunesse. « Mon message aux étudiants est de leur faire comprendre qu’ils peuvent faire évoluer les choses. Cela suppose donc une forme de courage. » 

En ce sens, Géraldine Mathieu estime que l’université doit aujourd’hui se réinventer. « Nous ne pouvons plus former des étudiants qui soient de purs théoriciens. » Dans cette optique, elle propose donc à ses étudiants de découvrir les enjeux liés au droit de la jeunesse via le service-learning (apprentissage par le service), une alternative aux travaux valorisée par des crédits. 70 % d’entre eux choisissent aujourd’hui cette option.

Géraldine Mathieu
Géraldine Mathieu

« Si je leur apprends les textes, je ne leur apprends rien ou presque. Le service-learning, lui, requiert à la fois de s’engager socialement, de réfléchir de manière critique, mais aussi de se comprendre soi-même et de comprendre la société. » Que ce soit aux côtés des Mena accompagnés par la Croix-Rouge, dans des pouponnières, des IPPJ, des maisons de quartier ou dans les services pédiatriques des hôpitaux, les étudiants peuvent ainsi développer leur esprit critique à partir de réalités de terrain hétérogènes et complexes. « Cela leur permet aussi de se rendre compte dès le départ si le métier leur convient. Car la réalité est souvent très dure », commente l’enseignante.

Déluge épistémique

De tout temps, l’exercice de l’esprit critique a exigé un apprentissage, une discipline, un engagement. Mais aujourd’hui, la surcharge informationnelle fait émerger de nouvelles difficultés. « On parle parfois d’"epistemic flooding" ou de "déluge épistémique" », explique Olivier Sartenaer. « Il y aurait simplement trop d’informations qui nous parviennent pour qu’on puisse les intégrer en faisant preuve d’esprit critique. » Sélectionner ses sources est donc une première étape essentielle. « Les étudiants doivent apprendre à ne pas foncer tête baissée sur les ressources », explique Élodie Mercy, bibliothécaire au sein du groupe formation de la BUMP (Bibliothèque universitaire Moretus Plantin). « C’est pourquoi on leur apprend à interroger les sources, à identifier les bonnes méthodologies, à trier l’information. » Marie-France Juchert, directrice de la BUMP, estime de son côté que sortir de l’université sans posséder ces compétences serait un véritable « échec ». « Aujourd’hui, les métiers évoluent », souligne-t-elle. « Il faut être capable de se former tout au long de la vie. Savoir se documenter est donc indispensable. » 

D’autant que l’émergence de l’intelligence artificielle a compliqué davantage encore le rapport aux sources. Katrien Beuls, professeure en intelligence artificielle à l’UNamur, estime ainsi que ChatGPT fait peser sur l’esprit critique des menaces inédites. Loin des discours rassurants de certains confrères, elle rappelle que la majorité des étudiants – et des citoyens – ignorent le fonctionnement des LLM (Large Language Model), qui ne sont en aucune manière des moteurs de recherche, mais des systèmes statistiques appliqués à la linguistique. « ChatGPT ne fait que deviner les mots qui suivent », rappelle-t-elle. « Il n’y a aucune base de connaissance derrière. 

Or, les étudiants pensent que c’est le nouveau Google ! » Pour Katrien Beuls, il est donc urgent de renforcer « les connaissances de base », sans lesquelles il est impossible d’exercer son esprit critique face aux IA. « Les étudiants me disent qu’ils utilisent ChatGPT simplement pour brainstormer... mais justement : former des pensées par soi-même, être créatif est la chose la plus difficile ! » 

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Katrien Beuls

Katrien Beuls alerte surtout sur la menace que les LLM font peser sur les compétences rédactionnelles. « Aujourd’hui, tous les étudiants utilisent ChatGPT. Il est donc devenu impossible de demander des travaux écrits... Or apprendre à écrire nourrit l’esprit critique. C’est quelque chose de très difficile – tout le monde le sait ! – et qui doit être entraîné presque chaque jour. À l’école, on n’utilise pas de calculatrice avant de maîtriser les bases du calcul ou de correcteur orthographique avant de bien maîtriser la langue... Cela devrait être pareil pour l’écriture. »

Pour autant, comme le souligne Olivier Sartenaer, penser que les jeunes, parce que biberonnés aux réseaux sociaux, auraient abdiqué leurs capacités critiques est sans fondement. C’est d’ailleurs ce qu’a encore montré le dernier « baromètre de l’esprit critique ».[1] « La formation des jeunes comprend aujourd’hui l’éducation aux médias, ce qui a tendance à les rendre plus critiques : en matière de "fake news", ce sont d’ailleurs souvent les personnes plus âgées qui tombent dans le panneau... », relève le philosophe. Par ailleurs, pour OIivier Sartenaer, la sensibilité accrue des jeunes aux questions de discriminations est précisément une preuve de l’excellente santé de leur esprit critique. « Ne pas accepter des choses injustes au nom de l’argument autorité est bel et bien une manifestation de l’esprit critique... même si c’est parfois déroutant et inconfortable pour les enseignants », conclut-il. 

 

[1] https://www.universcience.fr/fr/esprit-critique/barometre-esprit-critique-2025

71% des 15-24 ans estiment par exemple que les scientifiques suivent des règles éthiques strictes (contre 62% chez les 18 ans et +), 69% que ce sont les mieux placés dans leur domaine pour savoir ce qui est bon pour les citoyens (contre 57%), 62% estiment que la science est la seule source fiable de savoir (contre 53%), 66% que les scientifiques sont indépendants (contre 53%). Mais ils craignent en revanche davantage le pouvoir détenu par les scientifiques, qui peut les rendre dangereux (73% contre 65%). 

La théorie du raisonnement motivé

Dans sa conférence-spectacle « L’instant critique », un seul en scène élaboré dans le cadre de sa thèse de doctorat, Régis Falque, chercheur à la faculté EMCP (Économie Management Communication sciencesPo) de l’UNamur, entreprend de « faire vivre de manière expérientielle des moments d’esprit critique et des expériences sociales avec le public ». Accessible dès la quatrième secondaire, ce dispositif pédagogique explore comment « l’esprit critique relève à la fois de compétences comme la capacité à reconnaître un argument, à évaluer un raisonnement, à mener des recherches, mais aussi de dispositions comme l’ouverture d’esprit et l’empathie », résume Régis Falque. Une combinaison qui forme ce qu’on appelle « la vertu intellectuelle ». Vertu que personne ne peut se prévaloir de posséder une fois pour toutes... Face à des sujets « idéologiquement chaud » (vaccination, pseudosciences...), notre avis peut en effet influencer l’activation de nos compétences critiques. C’est ce qu’on appelle la théorie du raisonnement motivé. « Confronté à un sujet sur lequel il a une posture idéologique, même un individu avec un prix Nobel peut ne pas activer ses compétences liées à l’esprit critique ou plus dramatique encore, activer ses compétences dans le seul but de justifier son point de vue sur le sujet », souligne Régis Falque. Manière de rappeler qu’il n’existe pas de « professionnel de l’esprit critique » et que la vertu intellectuelle ne va jamais sans une forme de modestie. 

Régis Falque

Esprit critique et pédagogie immersive

Pour stimuler l’esprit critique de ses étudiants, Mélanie Latiers, enseignante au sein de la Faculté des Sciences économiques, sociales et de gestion de l’UNamur, utilise la pédagogie immersive. « Dès les premières semaines de cours, on emmène les étudiants deux jours en dehors de l’université pour travailler le processus créatif et la construction de leur projet. » Après le handicap et la précarité, les étudiants sont cette année invités à travailler autour du développement durable. L’objectif ? Partir de connaissances sensibles plutôt que théoriques pour mettre au point des projets davantage connectés aux problématiques. « La première année, la réalité virtuelle a permis aux étudiants de se plonger dans le quotidien d’un travailleur en situation de handicap (trouble de l’autisme, handicap visuel, etc.) », explique Mélanie Latiers. « Lorsque nous avons travaillé sur la précarité, nous avons utilisé une installation artistique "A mile in my shoes", qui, à partir de leur paire de chaussures, faisait entendre l’histoire de personnes en difficulté. » Une approche qui vise à « dézoomer de ses préconceptions » pour renouer dans un second temps avec une posture « plus scientifique ». « Grâce à cette approche, les étudiants se sentent davantage acteurs, moins impuissants par rapport à ces enjeux », résume l’enseignante. 

Cet article est tiré de la rubrique "Enjeux" du magazine Omalius #35 (Juillet 2025).

Omalius #37

Faculté EMCP : trois chercheurs primés - #3 Quand l’IA devient plus humaine : Florence Nizette (NaDI) décroche un prix international

Prix

Troisième et dernier focus de l’été sur le centre de recherche NaDI-CeRCLe, qui s’est démarqué à l’international ces dernières semaines grâce aux reconnaissances obtenues par trois jeunes chercheurs en management des services. Après Floriane Goosse et Victor Sluÿters, nous vous proposons de découvrir le travail de Florence Nizette, jeune chercheuse travaillant sur les technologies d’Intelligence artificielle.

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C’est lors d'une conférence internationale et multidisciplinaire organisée par l'Université de Saragosse (Espagne), AIRSI 2025, qui réunit plus de 200 chercheurs autour des technologies 4.0 (intelligence artificielle, robotique, assistants virtuels, avatars, métavers, réalité augmentée, big data, etc.), que Florence Nizette a brillamment reçu le Best Paper Award pour un article issu de sa thèse en intelligence artificielle.

Des services d’IA plus transparents et dignes de confiance

Dans sa thèse, Florence Nizette s’intéresse à la confiance des utilisateurs dans les technologies d’IA, et notamment à la notion « d’explicabilité » de celles-ci (XAI). Un aspect essentiel pour rendre ces outils plus compréhensibles, alors que leur usage ne fait qu’augmenter dans de nombreux secteurs. 

L’originalité du travail de Florence Nizette réside dans le déploiement d’une perspective multi-acteurs, un aspect encore peu étudié dans la littérature mais pourtant crucial pour favoriser l’adoption de ces outils. « J’ai interviewé différents acteurs dans des secteurs sensibles comme la finance ou les assurances, où la confiance est clé : des responsables d’entreprises, des manageurs, des experts, des développeurs et des utilisateurs dans le but d’avoir une vue globale de la manière dont on peut améliorer l’explicabilité des services d’IA. Mon travail a consisté à identifier les attentes et contraintes rencontrées par chacune des parties-prenantes dans le but de faire des ponts entre ces différents acteurs et de voir comment ils peuvent collaborer pour améliorer les services utilisant l’IA. »

En reconceptualisant l’explicabilité comme un défi centré sur l’humain, l’étude de Florence Nizette fournit des clés théoriques et pratiques pour développer des systèmes d’IA plus transparents et dignes de confiances, alignés sur les besoins des entreprises et conformes à la réglementation.

Une recherche menée à l’UNamur et à l’Université de Hasselt

Pour ce projet – basé sur des entretiens menés à l’échelle internationale avec des acteurs et parties prenantes de l'XAI –, Florence Nizette bénéficie de l’encadrement de ses promoteurs, les professeurs Wafa Hammedi (UNamur), Allard Van Riel (Université de Hasselt) et Nadia Steils (HEC Liège). La chercheuse a en effet la particularité de mener ses recherches à la fois à l’UNamur et à l’Université de Hasselt. Un avantage selon elle : « C’est très enrichissant, autant d’un point de vue intellectuel qu’au niveau de l’accès aux ressources et aux réseaux des deux régions », explique Florence Nizette.

Un parcours guidé par la rigueur, la curiosité et le goût des échanges

Au-delà de l’aspect scientifique, Florence met en avant la richesse humaine de son parcours. Intégrée à l’équipe dynamique du centre de recherche NaDI-CeRCLe, elle souligne l’entraide et la collaboration qui règnent au sein de son groupe, tout en ayant l’opportunité d’échanger aussi avec des équipes différentes, dans d’autres universités et à l’international. L’accompagnement de ses trois promoteurs, chacun apportant un regard singulier sur son travail, a constitué un soutien précieux tout au long de son parcours.

Selon Florence, la singularité de son parcours réside dans cette ouverture : apprendre et progresser en aidant les autres et en recevant leurs conseils, trouver l’enrichissement dans la diversité des collaborations et des points de vue. « Ce qui me stimule dans le doctorat, c’est autant la découverte scientifique que les interactions humaines : les discussions, les collaborations, la diversité des perspectives », explique-t-elle. Une expérience à la fois formatrice et profondément humaine, qui illustre la force du travail en réseau, du partage et de l’ouverture internationale.

Florence a bénéficié de l’ancrage académique offert par une communauté de chercheurs en services, tant au niveau national qu’international. La rigueur scientifique, l’exigence méthodologique et la qualité des échanges qui caractérisent cette communauté représentent une opportunité inestimable pour tout jeune chercheur. Cet environnement a nourri sa maturité scientifique et permis d’élever son travail à un niveau supérieur.

Le centre de recherche, par son atmosphère à la fois stimulante et bienveillante, constitue un terreau fertile pour le développement académique. À cela s’ajoutent la participation ou l'organisation d’événements d’envergure internationale, tels que Let’s Talk About Service (LTAS), conférence de référence par l’Association Américaine de Marketing, qui s’est tenue en 2023 à Namur, ainsi que les séminaires accueillant régulièrement des chercheurs de renom. Ces expériences lui ont non seulement permis d’intégrer les standards les plus élevés de la discipline, mais aussi de se challenger afin de développer et d’affiner ses compétences de chercheuse.

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Florence Nizette

A PhD is more than research; it is a journey of growth, curiosity, and resilience. Every challenge faced is an opportunity to learn and every discovery is a step toward making a meaningful impact.

Florence Nizette Doctorante à l'UNamur

Du jeu vidéo à l’intelligence artificielle, escale au Japon

Communication
Transition numérique
Mathématique
Informatique
Intelligence Artificielle

Près de 10 000 kilomètres séparent la Belgique du Japon, un pays qui fascine, notamment pour sa culture riche et pleine de contrastes. Les chercheurs de l’UNamur entretiennent des liens étroits avec plusieurs institutions nipponnes, notamment dans les domaines de l’informatique, des mathématiques ou encore du jeu vidéo. Coup de projecteur sur quelques-unes de ces collaborations.

Japon

Le Japon est une référence mondiale en matière de jeu vidéo. Nintendo, Sony, Sega… autant d’entreprises qui ont marqué la culture populaire contemporaine. Cette industrie, Fanny Barnabé la connaît bien. Chargée de cours à la Faculté Économie Management Communication sciencesPo (EMCP) et chercheuse à l’Institut de recherche CRIDS/NaDI, elle est spécialisée en game studies, un champ de recherche consacré à l’étude des jeux. Après une thèse de doctorat dédiée au détournement vidéoludique dans l’univers fictionnel de Pokémon, défendue en 2017, elle a réalisé un séjour postdoctoral d’un an au Ritsumeikan Center For Game Studies (Ritsumeikan University, à Kyoto), le plus grand centre de recherche sur le jeu vidéo de l’archipel. Reconnu à l’international, celui-ci a notamment la chance d’accueillir un fonds d’archives exceptionnel et inédit, qu’il doit à une donation du géant Nintendo.

Le Japon : un terreau fertile pour les recherches en game studies

« Ce séjour m’a permis de nouer des contacts durables avec les chercheurs du Centre et de m’insérer un peu plus dans le champ un peu de niche du jeu vidéo japonais », explique Fanny Barnabé. « Le Japon compte des chercheurs et des chercheuses de premier plan, reconnus à l’international, mais également des figures de l’industrie facilement mobilisables, grâce à la place importante qu’occupe le pays en termes de production de jeux vidéo. »

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Plusieurs années et travaux de recherche plus tard, Fanny Barnabé s’est rendue une nouvelle fois au Japon à la fin du mois de mai, à l’occasion d’une mission académique. Objectif : présenter les derniers travaux menés à l’UNamur, notamment en ludopédagogie ou « serious game » et, elle l’espère, jeter les bases de nouveaux partenariats et échanges étudiants.

L’IA verte en ligne de mire

La Faculté d’informatique entretient des liens de longue date avec le National Institute of Informatics (NII), un institut de recherche internationalement reconnu situé en plein cœur de Tokyo. Chaque année, des étudiants de Master et des doctorants de la faculté y sont accueillis pour une période de quatre à six mois afin d’y effectuer un stage et de mener à bien des projets de recherche, via un accord de collaboration spécifique (Memorandum Of Understanding agreement, ou MOU). Une expérience très appréciée par les étudiants et les doctorants, tant sur le plan scientifique qu’humain. 

Gilles Perrouin, chercheur et président de la Commission de la recherche de la Faculté d’informatique, accompagne ces étudiants dans la présentation de leur sujet de recherche, souvent axé dans les domaines du génie logiciel, de l’intelligence artificielle (IA) ou, plus récemment, de l’IA verte. « Ce sont des domaines de recherche qui évoluent très vite », précise Gilles Perrouin. « Il existe beaucoup de débats actuellement autour de la consommation énergétique de l’IA. C’est un peu un oxymore de dire qu’on peut faire de l’IA verte. Mais on y travaille via l’exploration de techniques plus malignes lors de la recherche de solutions prometteuses afin d’éviter le recours à l’entraînement systématique du réseau de neurones, très coûteux en énergie », explique le chercheur. La collaboration a donné lieu à l’exploration d’autres domaines de l’IA, tels que la reconnaissance de la langue des signes (professeur Benoît Frénay), en plus des sujets en méthodes formelles et génie logiciel (professeurs Pierre-Yves Schobbens et Xavier Devroey). 

La mission académique à laquelle a également pris part Gilles Perrouin en mai 2025, avait notamment pour objectif de renouveler l’accord de collaboration avec le NII, mais également de susciter de nouveaux partenariats prometteurs dans les domaines du génie logiciel, de l’IA, l’éthique ou la cybersécurité. 

 

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Pierre Poitier (troisième au fond à droite) a rejoint en 2024 l’équipe du professeur Satoh pour son doctorat sur l’IA appliquée à la langue des signes.

Les systèmes dynamiques sous la loupe

Au sein du Département de mathématique, Alexandre Mauroy, professeur et chercheur au Namur Institute for Complex Systems (naXys), travaille avec son collaborateur de longue date et ami Yoshihiko Susuki de la prestigieuse Université de Kyoto sur un projet co-financé par le F.N.R.S et le JSPS (Japon) visant à étudier les systèmes dynamiques. « Il s’agit de phénomènes dits “non-linéaires” qui ne respectent pas les règles de la proportionnalité. Les équations sont donc très difficiles, voire impossibles à résoudre en pratique », explique Alexandre Mauroy. « Pour contourner ce problème, on mobilise des techniques comme la théorie des opérateurs, que l’on étudie dans le cadre de ce projet. » Celui-ci a l’avantage de combiner les aspects théoriques et applications pratiques, notamment dans le domaine des réseaux de distribution électrique. « Ce sont des systèmes complexes, avec des dynamiques lentes et rapides. Un cas intéressant pour lequel les outils mathématiques doivent être adaptés. », poursuit Alexandre Mauroy. Ce premier partenariat positif a déjà permis des séjours de recherche entre les deux pays et promet de nouvelles collaborations dans le futur.

Dans un domaine voisin, Riccardo Muolo effectue depuis 2023 un postdoctorat à l'Institute of Science Tokyo, après avoir mené une thèse de doctorat à l’UNamur sous la supervision du professeur Timoteo Carletti. Dans la lignée des connaissances acquises lors de son doctorat sur la dynamique des réseaux, Riccardo Muolo s'intéresse aujourd’hui à la théorie de la synchronisation des réseaux, un modèle mathématique permettant de comprendre des systèmes très variés : des lucioles aux réseaux électriques en passant par le fonctionnement du cerveau humain : « Par exemple, dans le cerveau, une synchronisation anormale des réseaux neuronaux est associée à des pathologies comme l’épilepsie ou Parkinson. La récente faillite du réseau électrique en Espagne peut également s'analyser au travers de cette théorie », détaille le chercheur. 

Mobilité étudiante 

Les étudiants qui ont soif d’effectuer une partie de leur cursus au Japon ont la possibilité de le faire au moyen de différents accords que l’UNamur a conclus avec des établissements de l’Archipel. C’est le cas avec le National Institute of Informatics (NII), mais aussi avec la Soka University et la Sophia University (Chiyoda), avec lesquelles l’UNamur a signé des accords cadres. 

Cet article est tiré de la rubrique "Far away" du magazine Omalius #35 (Juillet 2025).

Omalius #37

Université et démocratie : un lien vivant, parfois menacé

Paroles d'experts
Démocratie

Méfiance envers les institutions politiques traditionnelles et les élus, montée des logiques autoritaires, définancement des services publics… La démocratie semble aujourd’hui traverser une zone de turbulences. Dans ce contexte, quel rôle l’université joue-t-elle ? Pour éclairer cette question, nous avons rencontré quatre chercheurs issus de disciplines différentes : la pédagogue Sephora Boucenna, le philosophe Louis Carré, le politologue Vincent Jacquet, la juriste Aline Nardi. Leurs regards croisés dessinent les contours d’un enjeu plus que jamais d’actualité : penser et défendre le lien entre université et démocratie.

démocratie-visages

La démocratie n’a rien d’un concept figé. Elle fait débat, surtout aujourd’hui. Louis Carré, directeur du Département de philosophie et membre de l’Espace philosophique de Namur (Institut ESPHIN), en propose une définition en trois dimensions : un régime politique, un état de droit et une manière de faire société.

Le concept de démocratie : entre pouvoir du peuple et centralisation

« Étymologiquement, la démocratie est un régime politique qui consiste à donner le pouvoir au peuple », rappelle-t-il. « Nos démocraties occidentales reposent aujourd’hui sur l’idée que le peuple est souverain, sans pour autant gouverner directement. De là naît une tension entre la démocratie idéale et la démocratie réelle. » Vincent Jacquet, professeur au Département des sciences sociales, politiques et de la communication et président de l’Institut Transitions appuie le propos : « La démocratie est un idéal d’autogouvernement des citoyens, mais il est en tension avec des logiques plus centralisatrices, plus autoritaires. […] Nos systèmes politiques sont traversés par ces différentes tensions, avec à la fois des logiques autoritaires de plus en plus présentes, y compris chez nous, et des logiques de participation qui s’accompagnent parfois de beaucoup d’espoir et de déception aussi. »

Deuxième pilier selon Louis Carré : l’État de droit. La démocratie garantit les droits fondamentaux de tous les citoyens par la constitution. Mais là encore, gare aux paradoxes : « On pourrait en effet imaginer des lois prises par la majorité des représentants ou par un référendum, mais qui contreviennent aux droits fondamentaux », souligne le philosophe. La démocratie ne peut donc se résumer au seul principe majoritaire.

Enfin, la démocratie est également une manière de faire société. Elle repose sur un réel pluralisme : diversité des opinions, des croyances et des valeurs. « Cela suppose l’existence d’un espace public relativement autonome face au pouvoir en place qui, par moment, conteste les décisions prises par les gouvernements qui ont été élus », insiste Louis Carré.

La méfiance des citoyens vis-à-vis du politique n’est, à ce titre, pas nécessairement un symptôme de crise démocratique. Elle peut même en être un signe de vitalité, comme l’explique Vincent Jacquet : « Le fait que les citoyens soient critiques envers leur gouvernement n’est pas forcément négatif parce que, dans une démocratie, les citoyens doivent pouvoir contrôler les actions des gouvernants ».

Photo de Vincent Jacquet
Vincent Jacquet

Former les gouvernants… et les gouvernés

Dans ce contexte, quelle est la responsabilité de l’université ? Louis Carré rappelle d’abord une réalité simple : une grande partie de nos élus sont passés par les bancs de l’université. Mais sa mission d’enseignement ne s’arrête pas là. « Il s’agit de former des citoyens éclairés, pas seulement des gouvernants. Les universités doivent offrir un enseignement supérieur de qualité, ouvert au plus grand nombre », affirme-t-il.

« La démocratie suppose en effet des citoyens capables de débattre, de réfléchir, de problématiser les enjeux », complète Sephora Boucenna, doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation et de la formation et membre de l’Institut de Recherches en Didactiques et Éducation de l’UNamur (IRDENA). Il s’agit donc de former des esprits réflexifs, aptes à interroger leur époque.

Former des enseignants réflexifs, pour des citoyens critiques

L’université forme également ceux qui, demain, éduqueront les générations futures : les enseignants. Et là encore, la démocratie est en jeu.

 « Notre mission est de former des enseignants réflexifs qui, eux-mêmes, apprendront à leurs élèves à penser de manière critique », insiste Sephora Boucenna. Cela passe par un travail en profondeur sur l’analyse de pratiques, la construction collective et l’apprentissage du débat, dès la formation initiale des enseignants jusqu'à leur formation continue. 

Sephora BOUCENNA
Sephora Boucenna

Produire et diffuser du savoir… en toute indépendance

Outre l’enseignement, l’université a également une mission de recherche et de service à la société. Elle produit des savoirs qui peuvent éclairer les politiques publiques, mais aussi les questionner. Cette fonction critique suppose une indépendance réelle vis-à-vis du politique. « Pour analyser avec lucidité les mécanismes démocratiques, y compris ceux que les gouvernements mettent en place, il faut que l’université garde sa liberté de recherche et de parole », souligne Vincent Jacquet.

 

Louis Carré va plus loin : « Comme la presse, l’université est une forme de contre-pouvoir dans l’espace public ». Il précise par ailleurs qu’« il y a une confusion entre liberté d’opinion et liberté académique. Les savoirs universitaires passent par une série de procédures de vérification, d’expérimentation, de discussion au sein de la communauté scientifique. Cela leur donne une robustesse qui n’est pas celle d’une opinion, d’une valeur, d’une croyance. » 

Louis Carré
Louis Carré

Cette fonction critique de l’université suppose donc une indépendance forte. Or, en Belgique, le financement des universités relève largement du pouvoir politique. « Celane doit pas signifier une mise sous tutelle », alerte Louis Carré. « Mener des recherches critiques, qui ne satisfont pas à court terme des commanditaires, demande une indépendance, y compris de moyens. Il faut des chercheurs en nombre qui puissent analyser différents types de dynamiques. Plus on coupera dans les finances de la recherche, comme c’est le cas aujourd’hui, moins on aura de chercheurs et donc de capacité d’analyse indépendante et de diversité des perspectives », insiste Vincent Jacquet.

Le mouvement « Université en colère », récemment lancé au sein des universités de la Fédération Wallonie-Bruxelles, entend dénoncer les effets du définancement. Ses représentants appellent à « garantir les conditions de développement d’une université ouverte, indépendante, de qualité et accessible au plus grand nombre. Face aux défis sociaux, économiques et politiques de notre temps et parce que d’autres choix de société, et donc budgétaires, sont possibles, il est plus que jamais essentiel de renforcer les institutions et les acteurs au cœur de la production du savoir. » 

Entre vigilance et engagement : un lien à réinventer

La démocratie ne se limite donc ni aux élections ni aux institutions. Elle repose sur une vigilance collective, portée par les citoyens, les savoirs… et les lieux où ces savoirs se construisent. À ce titre, l’université apparaît comme un maillon essentiel de la vitalité démocratique. À condition de rester indépendante, accessible et ouverte sur la société.

« La démocratie, ce n’est pas seulement une affaire d’institutions. C’est l’affaire de citoyens qui la font vivre et qui s’organisent pour faire valoir leurs perspectives à différents moments », insiste Vincent Jacquet. Une invitation claire à ne pas rester spectateur, mais à participer, avec lucidité et exigence, à la construction d’un avenir démocratique commun.

Une année académique, placée sous la thématique de la démocratie

Retrouvez le discours prononcé par la Rectrice Annick Castiaux lors de la Cérémonie de rentrée académique 2025-2026.

Discours de la Rectrice à la Cérémonie de rentrée académique 2025-2026

Cet article est tiré de la rubrique "Enjeux" du magazine Omalius #38 (Septembre 2025).

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Enseigner l’esprit critique

Intelligence Artificielle
Étudiants

Art du doute fécond, l’esprit critique s’apprend et s’entretient. Face à la surcharge d’information et au déploiement de l’intelligence artificielle, il est plus que jamais nécessaire pour les étudiants de développer cette faculté tout au long de leur cursus. À l’UNamur, cette nécessité pédagogique se veut protéiforme. 

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Toute pensée qui se forme dans notre conscience est influencée à la fois par des contraintes externes – argument d’autorité, dogmatisme – mais aussi par des contraintes internes – opinions, émotions, suggestions. Faire preuve d’esprit critique est donc toujours d’abord un exercice réflexif, comme l’illustrait déjà Socrate. « À travers la maïeutique, l’art du dialogue, Socrate cherchait à remettre en question ses propres opinions. Il disait : la seule chose que je sais, c’est que je ne sais rien », rappelle Sabina Tortorella, chercheuse en philosophie politique à l’UNamur.  À partir de l’époque des Lumières, cet art de la mise en doute (étymologiquement, « critiquer », qui vient du grec, signifie « discerner ») se conçoit aussi comme la possibilité de faire usage public de la raison. « Dans la conception de Kant, la critique comporte une dimension d’émancipation », développe Sabina Tortorella.  « Elle consiste à sortir d’un état de tutelle, par ailleurs souvent très commode... » Avec Kant émerge aussi l’idée qu’il ne faut pas seulement se méfier du dogmatisme ou de ses émotions, mais de ses propres raisonnements : c’est la raison même qui fait l’objet de la critique. Bien sûr, cette disposition critique n’est pas la responsabilité des seuls individus : elle exige des institutions qui autorisent et encouragent le débat, la discussion, la confrontation.  « L’esprit critique est une attitude, un éthos qui ne peut pas se développer dans n’importe quel contexte », souligne Sabina Tortorella. « C’est pourquoi renforcer l’esprit critique demande d’abord de renforcer les institutions démocratiques. »

Proportionner sa confiance

« L’esprit critique pourrait être défini comme la faculté de proportionner correctement la confiance qu’on accorde à certains discours en fonction de leur qualité intrinsèque », commente Olivier Sartenaer, chargé de cours en philosophie des sciences à l'UNamur. 

Olivier Sartenaer
Olivier Sartenaer

« Autrement dit, si l’on est critique, on doit accorder beaucoup de confiance aux discours fiables et peu ou pas de confiance à ceux qui sont peu fiables. Par exemple, le platisme, qui considère que la terre est plate, peut être considéré comme une théorie peu fiable. Y croire beaucoup, c’est donc faire preuve de peu d’esprit critique. » Paradoxalement, la pensée complotiste revendique pourtant avec virulence son caractère critique, alors que, comme le souligne Sabina Tortorella, « l’esprit critique n’est pas le scepticisme radical. » Cette faculté de proportionner adéquatement sa confiance ne peut d’ailleurs être assimilée à la notion d’intelligence. « Cela relève aussi de dispositions psychosociales », souligne Olivier Sartenaer. « On sait par exemple que le climatoscepticisme est le fait de gens plutôt conservateurs. Concernant des cas extrêmes comme le platisme, on retrouve souvent une souffrance psychosociale, une forme de marginalité. Adhérer au platisme, c’est alors trouver une communauté, un sentiment d’appartenance. Si l’on était dans une société moins violente, plus bienveillante, il y aurait probablement moins d’adhésion à ces théories. »

Un privilège qui oblige 

Car la possibilité d’exercer son esprit critique est aussi une forme de privilège. « La faculté de discernement demande du temps et de l’énergie : c’est un travail qui met en jeu des dispositifs cognitifs assez coûteux », poursuit Olivier Sartenaer. « Tout le monde est capable d’avoir de l’esprit critique, mais s’asseoir et avoir le temps de penser est un luxe inouï », rappelle de son côté Géraldine Mathieu, professeure à la Faculté de droit de l’UNamur. Un luxe qui, selon elle, oblige à une forme d’engagement. « L’esprit critique, c’est aussi critiquer la norme, la loi, la jurisprudence et la combattre quand elle ne nous paraît pas juste », souligne la spécialiste du droit de la jeunesse. « Mon message aux étudiants est de leur faire comprendre qu’ils peuvent faire évoluer les choses. Cela suppose donc une forme de courage. » 

En ce sens, Géraldine Mathieu estime que l’université doit aujourd’hui se réinventer. « Nous ne pouvons plus former des étudiants qui soient de purs théoriciens. » Dans cette optique, elle propose donc à ses étudiants de découvrir les enjeux liés au droit de la jeunesse via le service-learning (apprentissage par le service), une alternative aux travaux valorisée par des crédits. 70 % d’entre eux choisissent aujourd’hui cette option.

Géraldine Mathieu
Géraldine Mathieu

« Si je leur apprends les textes, je ne leur apprends rien ou presque. Le service-learning, lui, requiert à la fois de s’engager socialement, de réfléchir de manière critique, mais aussi de se comprendre soi-même et de comprendre la société. » Que ce soit aux côtés des Mena accompagnés par la Croix-Rouge, dans des pouponnières, des IPPJ, des maisons de quartier ou dans les services pédiatriques des hôpitaux, les étudiants peuvent ainsi développer leur esprit critique à partir de réalités de terrain hétérogènes et complexes. « Cela leur permet aussi de se rendre compte dès le départ si le métier leur convient. Car la réalité est souvent très dure », commente l’enseignante.

Déluge épistémique

De tout temps, l’exercice de l’esprit critique a exigé un apprentissage, une discipline, un engagement. Mais aujourd’hui, la surcharge informationnelle fait émerger de nouvelles difficultés. « On parle parfois d’"epistemic flooding" ou de "déluge épistémique" », explique Olivier Sartenaer. « Il y aurait simplement trop d’informations qui nous parviennent pour qu’on puisse les intégrer en faisant preuve d’esprit critique. » Sélectionner ses sources est donc une première étape essentielle. « Les étudiants doivent apprendre à ne pas foncer tête baissée sur les ressources », explique Élodie Mercy, bibliothécaire au sein du groupe formation de la BUMP (Bibliothèque universitaire Moretus Plantin). « C’est pourquoi on leur apprend à interroger les sources, à identifier les bonnes méthodologies, à trier l’information. » Marie-France Juchert, directrice de la BUMP, estime de son côté que sortir de l’université sans posséder ces compétences serait un véritable « échec ». « Aujourd’hui, les métiers évoluent », souligne-t-elle. « Il faut être capable de se former tout au long de la vie. Savoir se documenter est donc indispensable. » 

D’autant que l’émergence de l’intelligence artificielle a compliqué davantage encore le rapport aux sources. Katrien Beuls, professeure en intelligence artificielle à l’UNamur, estime ainsi que ChatGPT fait peser sur l’esprit critique des menaces inédites. Loin des discours rassurants de certains confrères, elle rappelle que la majorité des étudiants – et des citoyens – ignorent le fonctionnement des LLM (Large Language Model), qui ne sont en aucune manière des moteurs de recherche, mais des systèmes statistiques appliqués à la linguistique. « ChatGPT ne fait que deviner les mots qui suivent », rappelle-t-elle. « Il n’y a aucune base de connaissance derrière. 

Or, les étudiants pensent que c’est le nouveau Google ! » Pour Katrien Beuls, il est donc urgent de renforcer « les connaissances de base », sans lesquelles il est impossible d’exercer son esprit critique face aux IA. « Les étudiants me disent qu’ils utilisent ChatGPT simplement pour brainstormer... mais justement : former des pensées par soi-même, être créatif est la chose la plus difficile ! » 

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Katrien Beuls

Katrien Beuls alerte surtout sur la menace que les LLM font peser sur les compétences rédactionnelles. « Aujourd’hui, tous les étudiants utilisent ChatGPT. Il est donc devenu impossible de demander des travaux écrits... Or apprendre à écrire nourrit l’esprit critique. C’est quelque chose de très difficile – tout le monde le sait ! – et qui doit être entraîné presque chaque jour. À l’école, on n’utilise pas de calculatrice avant de maîtriser les bases du calcul ou de correcteur orthographique avant de bien maîtriser la langue... Cela devrait être pareil pour l’écriture. »

Pour autant, comme le souligne Olivier Sartenaer, penser que les jeunes, parce que biberonnés aux réseaux sociaux, auraient abdiqué leurs capacités critiques est sans fondement. C’est d’ailleurs ce qu’a encore montré le dernier « baromètre de l’esprit critique ».[1] « La formation des jeunes comprend aujourd’hui l’éducation aux médias, ce qui a tendance à les rendre plus critiques : en matière de "fake news", ce sont d’ailleurs souvent les personnes plus âgées qui tombent dans le panneau... », relève le philosophe. Par ailleurs, pour OIivier Sartenaer, la sensibilité accrue des jeunes aux questions de discriminations est précisément une preuve de l’excellente santé de leur esprit critique. « Ne pas accepter des choses injustes au nom de l’argument autorité est bel et bien une manifestation de l’esprit critique... même si c’est parfois déroutant et inconfortable pour les enseignants », conclut-il. 

 

[1] https://www.universcience.fr/fr/esprit-critique/barometre-esprit-critique-2025

71% des 15-24 ans estiment par exemple que les scientifiques suivent des règles éthiques strictes (contre 62% chez les 18 ans et +), 69% que ce sont les mieux placés dans leur domaine pour savoir ce qui est bon pour les citoyens (contre 57%), 62% estiment que la science est la seule source fiable de savoir (contre 53%), 66% que les scientifiques sont indépendants (contre 53%). Mais ils craignent en revanche davantage le pouvoir détenu par les scientifiques, qui peut les rendre dangereux (73% contre 65%). 

La théorie du raisonnement motivé

Dans sa conférence-spectacle « L’instant critique », un seul en scène élaboré dans le cadre de sa thèse de doctorat, Régis Falque, chercheur à la faculté EMCP (Économie Management Communication sciencesPo) de l’UNamur, entreprend de « faire vivre de manière expérientielle des moments d’esprit critique et des expériences sociales avec le public ». Accessible dès la quatrième secondaire, ce dispositif pédagogique explore comment « l’esprit critique relève à la fois de compétences comme la capacité à reconnaître un argument, à évaluer un raisonnement, à mener des recherches, mais aussi de dispositions comme l’ouverture d’esprit et l’empathie », résume Régis Falque. Une combinaison qui forme ce qu’on appelle « la vertu intellectuelle ». Vertu que personne ne peut se prévaloir de posséder une fois pour toutes... Face à des sujets « idéologiquement chaud » (vaccination, pseudosciences...), notre avis peut en effet influencer l’activation de nos compétences critiques. C’est ce qu’on appelle la théorie du raisonnement motivé. « Confronté à un sujet sur lequel il a une posture idéologique, même un individu avec un prix Nobel peut ne pas activer ses compétences liées à l’esprit critique ou plus dramatique encore, activer ses compétences dans le seul but de justifier son point de vue sur le sujet », souligne Régis Falque. Manière de rappeler qu’il n’existe pas de « professionnel de l’esprit critique » et que la vertu intellectuelle ne va jamais sans une forme de modestie. 

Régis Falque

Esprit critique et pédagogie immersive

Pour stimuler l’esprit critique de ses étudiants, Mélanie Latiers, enseignante au sein de la Faculté des Sciences économiques, sociales et de gestion de l’UNamur, utilise la pédagogie immersive. « Dès les premières semaines de cours, on emmène les étudiants deux jours en dehors de l’université pour travailler le processus créatif et la construction de leur projet. » Après le handicap et la précarité, les étudiants sont cette année invités à travailler autour du développement durable. L’objectif ? Partir de connaissances sensibles plutôt que théoriques pour mettre au point des projets davantage connectés aux problématiques. « La première année, la réalité virtuelle a permis aux étudiants de se plonger dans le quotidien d’un travailleur en situation de handicap (trouble de l’autisme, handicap visuel, etc.) », explique Mélanie Latiers. « Lorsque nous avons travaillé sur la précarité, nous avons utilisé une installation artistique "A mile in my shoes", qui, à partir de leur paire de chaussures, faisait entendre l’histoire de personnes en difficulté. » Une approche qui vise à « dézoomer de ses préconceptions » pour renouer dans un second temps avec une posture « plus scientifique ». « Grâce à cette approche, les étudiants se sentent davantage acteurs, moins impuissants par rapport à ces enjeux », résume l’enseignante. 

Cet article est tiré de la rubrique "Enjeux" du magazine Omalius #35 (Juillet 2025).

Omalius #37

Faculté EMCP : trois chercheurs primés - #3 Quand l’IA devient plus humaine : Florence Nizette (NaDI) décroche un prix international

Prix

Troisième et dernier focus de l’été sur le centre de recherche NaDI-CeRCLe, qui s’est démarqué à l’international ces dernières semaines grâce aux reconnaissances obtenues par trois jeunes chercheurs en management des services. Après Floriane Goosse et Victor Sluÿters, nous vous proposons de découvrir le travail de Florence Nizette, jeune chercheuse travaillant sur les technologies d’Intelligence artificielle.

florence-nizette-emcp

C’est lors d'une conférence internationale et multidisciplinaire organisée par l'Université de Saragosse (Espagne), AIRSI 2025, qui réunit plus de 200 chercheurs autour des technologies 4.0 (intelligence artificielle, robotique, assistants virtuels, avatars, métavers, réalité augmentée, big data, etc.), que Florence Nizette a brillamment reçu le Best Paper Award pour un article issu de sa thèse en intelligence artificielle.

Des services d’IA plus transparents et dignes de confiance

Dans sa thèse, Florence Nizette s’intéresse à la confiance des utilisateurs dans les technologies d’IA, et notamment à la notion « d’explicabilité » de celles-ci (XAI). Un aspect essentiel pour rendre ces outils plus compréhensibles, alors que leur usage ne fait qu’augmenter dans de nombreux secteurs. 

L’originalité du travail de Florence Nizette réside dans le déploiement d’une perspective multi-acteurs, un aspect encore peu étudié dans la littérature mais pourtant crucial pour favoriser l’adoption de ces outils. « J’ai interviewé différents acteurs dans des secteurs sensibles comme la finance ou les assurances, où la confiance est clé : des responsables d’entreprises, des manageurs, des experts, des développeurs et des utilisateurs dans le but d’avoir une vue globale de la manière dont on peut améliorer l’explicabilité des services d’IA. Mon travail a consisté à identifier les attentes et contraintes rencontrées par chacune des parties-prenantes dans le but de faire des ponts entre ces différents acteurs et de voir comment ils peuvent collaborer pour améliorer les services utilisant l’IA. »

En reconceptualisant l’explicabilité comme un défi centré sur l’humain, l’étude de Florence Nizette fournit des clés théoriques et pratiques pour développer des systèmes d’IA plus transparents et dignes de confiances, alignés sur les besoins des entreprises et conformes à la réglementation.

Une recherche menée à l’UNamur et à l’Université de Hasselt

Pour ce projet – basé sur des entretiens menés à l’échelle internationale avec des acteurs et parties prenantes de l'XAI –, Florence Nizette bénéficie de l’encadrement de ses promoteurs, les professeurs Wafa Hammedi (UNamur), Allard Van Riel (Université de Hasselt) et Nadia Steils (HEC Liège). La chercheuse a en effet la particularité de mener ses recherches à la fois à l’UNamur et à l’Université de Hasselt. Un avantage selon elle : « C’est très enrichissant, autant d’un point de vue intellectuel qu’au niveau de l’accès aux ressources et aux réseaux des deux régions », explique Florence Nizette.

Un parcours guidé par la rigueur, la curiosité et le goût des échanges

Au-delà de l’aspect scientifique, Florence met en avant la richesse humaine de son parcours. Intégrée à l’équipe dynamique du centre de recherche NaDI-CeRCLe, elle souligne l’entraide et la collaboration qui règnent au sein de son groupe, tout en ayant l’opportunité d’échanger aussi avec des équipes différentes, dans d’autres universités et à l’international. L’accompagnement de ses trois promoteurs, chacun apportant un regard singulier sur son travail, a constitué un soutien précieux tout au long de son parcours.

Selon Florence, la singularité de son parcours réside dans cette ouverture : apprendre et progresser en aidant les autres et en recevant leurs conseils, trouver l’enrichissement dans la diversité des collaborations et des points de vue. « Ce qui me stimule dans le doctorat, c’est autant la découverte scientifique que les interactions humaines : les discussions, les collaborations, la diversité des perspectives », explique-t-elle. Une expérience à la fois formatrice et profondément humaine, qui illustre la force du travail en réseau, du partage et de l’ouverture internationale.

Florence a bénéficié de l’ancrage académique offert par une communauté de chercheurs en services, tant au niveau national qu’international. La rigueur scientifique, l’exigence méthodologique et la qualité des échanges qui caractérisent cette communauté représentent une opportunité inestimable pour tout jeune chercheur. Cet environnement a nourri sa maturité scientifique et permis d’élever son travail à un niveau supérieur.

Le centre de recherche, par son atmosphère à la fois stimulante et bienveillante, constitue un terreau fertile pour le développement académique. À cela s’ajoutent la participation ou l'organisation d’événements d’envergure internationale, tels que Let’s Talk About Service (LTAS), conférence de référence par l’Association Américaine de Marketing, qui s’est tenue en 2023 à Namur, ainsi que les séminaires accueillant régulièrement des chercheurs de renom. Ces expériences lui ont non seulement permis d’intégrer les standards les plus élevés de la discipline, mais aussi de se challenger afin de développer et d’affiner ses compétences de chercheuse.

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Florence Nizette

A PhD is more than research; it is a journey of growth, curiosity, and resilience. Every challenge faced is an opportunity to learn and every discovery is a step toward making a meaningful impact.

Florence Nizette Doctorante à l'UNamur

Du jeu vidéo à l’intelligence artificielle, escale au Japon

Communication
Transition numérique
Mathématique
Informatique
Intelligence Artificielle

Près de 10 000 kilomètres séparent la Belgique du Japon, un pays qui fascine, notamment pour sa culture riche et pleine de contrastes. Les chercheurs de l’UNamur entretiennent des liens étroits avec plusieurs institutions nipponnes, notamment dans les domaines de l’informatique, des mathématiques ou encore du jeu vidéo. Coup de projecteur sur quelques-unes de ces collaborations.

Japon

Le Japon est une référence mondiale en matière de jeu vidéo. Nintendo, Sony, Sega… autant d’entreprises qui ont marqué la culture populaire contemporaine. Cette industrie, Fanny Barnabé la connaît bien. Chargée de cours à la Faculté Économie Management Communication sciencesPo (EMCP) et chercheuse à l’Institut de recherche CRIDS/NaDI, elle est spécialisée en game studies, un champ de recherche consacré à l’étude des jeux. Après une thèse de doctorat dédiée au détournement vidéoludique dans l’univers fictionnel de Pokémon, défendue en 2017, elle a réalisé un séjour postdoctoral d’un an au Ritsumeikan Center For Game Studies (Ritsumeikan University, à Kyoto), le plus grand centre de recherche sur le jeu vidéo de l’archipel. Reconnu à l’international, celui-ci a notamment la chance d’accueillir un fonds d’archives exceptionnel et inédit, qu’il doit à une donation du géant Nintendo.

Le Japon : un terreau fertile pour les recherches en game studies

« Ce séjour m’a permis de nouer des contacts durables avec les chercheurs du Centre et de m’insérer un peu plus dans le champ un peu de niche du jeu vidéo japonais », explique Fanny Barnabé. « Le Japon compte des chercheurs et des chercheuses de premier plan, reconnus à l’international, mais également des figures de l’industrie facilement mobilisables, grâce à la place importante qu’occupe le pays en termes de production de jeux vidéo. »

fanny-barnabe-japon

Plusieurs années et travaux de recherche plus tard, Fanny Barnabé s’est rendue une nouvelle fois au Japon à la fin du mois de mai, à l’occasion d’une mission académique. Objectif : présenter les derniers travaux menés à l’UNamur, notamment en ludopédagogie ou « serious game » et, elle l’espère, jeter les bases de nouveaux partenariats et échanges étudiants.

L’IA verte en ligne de mire

La Faculté d’informatique entretient des liens de longue date avec le National Institute of Informatics (NII), un institut de recherche internationalement reconnu situé en plein cœur de Tokyo. Chaque année, des étudiants de Master et des doctorants de la faculté y sont accueillis pour une période de quatre à six mois afin d’y effectuer un stage et de mener à bien des projets de recherche, via un accord de collaboration spécifique (Memorandum Of Understanding agreement, ou MOU). Une expérience très appréciée par les étudiants et les doctorants, tant sur le plan scientifique qu’humain. 

Gilles Perrouin, chercheur et président de la Commission de la recherche de la Faculté d’informatique, accompagne ces étudiants dans la présentation de leur sujet de recherche, souvent axé dans les domaines du génie logiciel, de l’intelligence artificielle (IA) ou, plus récemment, de l’IA verte. « Ce sont des domaines de recherche qui évoluent très vite », précise Gilles Perrouin. « Il existe beaucoup de débats actuellement autour de la consommation énergétique de l’IA. C’est un peu un oxymore de dire qu’on peut faire de l’IA verte. Mais on y travaille via l’exploration de techniques plus malignes lors de la recherche de solutions prometteuses afin d’éviter le recours à l’entraînement systématique du réseau de neurones, très coûteux en énergie », explique le chercheur. La collaboration a donné lieu à l’exploration d’autres domaines de l’IA, tels que la reconnaissance de la langue des signes (professeur Benoît Frénay), en plus des sujets en méthodes formelles et génie logiciel (professeurs Pierre-Yves Schobbens et Xavier Devroey). 

La mission académique à laquelle a également pris part Gilles Perrouin en mai 2025, avait notamment pour objectif de renouveler l’accord de collaboration avec le NII, mais également de susciter de nouveaux partenariats prometteurs dans les domaines du génie logiciel, de l’IA, l’éthique ou la cybersécurité. 

 

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Pierre Poitier (troisième au fond à droite) a rejoint en 2024 l’équipe du professeur Satoh pour son doctorat sur l’IA appliquée à la langue des signes.

Les systèmes dynamiques sous la loupe

Au sein du Département de mathématique, Alexandre Mauroy, professeur et chercheur au Namur Institute for Complex Systems (naXys), travaille avec son collaborateur de longue date et ami Yoshihiko Susuki de la prestigieuse Université de Kyoto sur un projet co-financé par le F.N.R.S et le JSPS (Japon) visant à étudier les systèmes dynamiques. « Il s’agit de phénomènes dits “non-linéaires” qui ne respectent pas les règles de la proportionnalité. Les équations sont donc très difficiles, voire impossibles à résoudre en pratique », explique Alexandre Mauroy. « Pour contourner ce problème, on mobilise des techniques comme la théorie des opérateurs, que l’on étudie dans le cadre de ce projet. » Celui-ci a l’avantage de combiner les aspects théoriques et applications pratiques, notamment dans le domaine des réseaux de distribution électrique. « Ce sont des systèmes complexes, avec des dynamiques lentes et rapides. Un cas intéressant pour lequel les outils mathématiques doivent être adaptés. », poursuit Alexandre Mauroy. Ce premier partenariat positif a déjà permis des séjours de recherche entre les deux pays et promet de nouvelles collaborations dans le futur.

Dans un domaine voisin, Riccardo Muolo effectue depuis 2023 un postdoctorat à l'Institute of Science Tokyo, après avoir mené une thèse de doctorat à l’UNamur sous la supervision du professeur Timoteo Carletti. Dans la lignée des connaissances acquises lors de son doctorat sur la dynamique des réseaux, Riccardo Muolo s'intéresse aujourd’hui à la théorie de la synchronisation des réseaux, un modèle mathématique permettant de comprendre des systèmes très variés : des lucioles aux réseaux électriques en passant par le fonctionnement du cerveau humain : « Par exemple, dans le cerveau, une synchronisation anormale des réseaux neuronaux est associée à des pathologies comme l’épilepsie ou Parkinson. La récente faillite du réseau électrique en Espagne peut également s'analyser au travers de cette théorie », détaille le chercheur. 

Mobilité étudiante 

Les étudiants qui ont soif d’effectuer une partie de leur cursus au Japon ont la possibilité de le faire au moyen de différents accords que l’UNamur a conclus avec des établissements de l’Archipel. C’est le cas avec le National Institute of Informatics (NII), mais aussi avec la Soka University et la Sophia University (Chiyoda), avec lesquelles l’UNamur a signé des accords cadres. 

Cet article est tiré de la rubrique "Far away" du magazine Omalius #35 (Juillet 2025).

Omalius #37
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Événements

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Cours ouverts de printemps

Evénement institutionnel

Cours ouverts de printemps

Institution
Futurs étudiants
19
08:30 - 25
16:30
Rue de Bruxelles, 85 - 5000 Namur
Personne de contact :  Info études

Découvrez la vie universitaire lors des cours ouverts de printemps !

5 jours pour plonger dans le quotidien des étudiants

Pendant les congés de l’enseignement secondaire, l’Université de Namur vous invite à vivre l’expérience universitaire de l’intérieur.

Assistez à des cours (plus de 300 heures accessibles), participez à des travaux pratiques, rencontrez des professeurs et explorez le campus et la ville.

21

Portes ouvertes de printemps

Evénement institutionnel

Portes ouvertes de printemps

Institution
Futurs étudiants
21
13:00 - 16:30
Rue de Bruxelles, 65 - 5000 Namur
Personne de contact :  Info études

Découvrez l’UNamur lors des portes ouvertes de printemps ! 
Un après-midi pour explorer, échanger et s’inspirer.

Save the date !

L’Université de Namur vous ouvre grand ses portes le samedi 21 mars 2026, de 13h à 16h30.
Réservez dès maintenant cette date dans votre agenda !

Au programme :

  • Rencontres inspirantes — Discutez avec nos professeurs, assistants et étudiants.
  • Visites immersives — Parcourez nos auditoires, salles de cours et laboratoires.
  • Informations précieuses — Obtenez des réponses à toutes vos questions sur nos programmes et les spécificités des études à Namur.
  • Ressources pratiques — Découvrez les services qui accompagnent nos étudiants avant, pendant et après leurs études.

Restez à l’écoute ! 

Le programme détaillé de l’après-midi sera publié une dizaine de jours avant l’évènement.

Vous ne pourrez pas être des nôtres ce jour-là ?

Pas de souci ! Un second après-midi portes ouvertes aura lieu le samedi 27 juin 2026, de 13h à 16h30.

Venez vivre l’expérience UNamur et laissez-vous inspirer par une université à taille humaine, au cœur de la ville !

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Portes ouvertes d'été

Evénement institutionnel

Portes ouvertes d'été

Institution
Futurs étudiants
27
13:00 - 16:30
Rue de Bruxelles, 65 - 5000 Namur
Personne de contact :  Info études

Préparez votre rentrée lors des portes ouvertes !
Une occasion idéale pour faire le point avant de profiter pleinement de l’été.

Save the date !

Le samedi 27 juin 2026, de 13h à 16h30, l’Université de Namur vous ouvre à nouveau ses portes pour un après-midi de rencontres et de découvertes.

Au programme :

  • Échanges enrichissants — Rencontrez nos professeurs, assistants, étudiants et membres du staff.
  • Conseils personnalisés — Obtenez des réponses à toutes vos questions sur vos futures études et la vie universitaire à Namur.
  • Accompagnement pratique — Faites le plein d’infos utiles pour finaliser vos démarches : inscription, cours préparatoires, recherche de logement, aides financières et bien plus encore.

Restez à l’écoute ! 

Le programme détaillé de l’après-midi sera disponible une dizaine de jours avant l’évènement.

Venez préparer votre rentrée en toute sérénité… et entrez dans l’été l’esprit léger ! 

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Recherche

Les nombreuses équipes de recherche de la Faculté visent à produire une recherche d'excellence où la qualité prime sur la quantité. En concentrant leurs efforts de recherche dans des domaines de pointe, elles produisent une recherche scientifique, ouverte aux rapprochements interdisciplinaires, ayant un impact sociétal, à l’échelle nationale et internationale. Les recherches menées dans la Faculté nourrissent son enseignement et sa capacité à innover. 

International

En plus de l’internationalisation de la vie facultaire (cours et autres activités, étudiants, enseignants), la Faculté offre en Bachelier et en Master des opportunités de mobilité sous la forme de programmes d’échange “cours” (séjour Erasmus Belgica, Erasmus + et hors Europe) ainsi que sous la forme de stages en entreprise et autres organisations à l’étranger ! 

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Le mot du Doyen

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Les étudiants sont au cœur de notre métier, ils sont notre joie, notre fierté. En travaillant ensemble, de manière franche, créative et constructive, nous ferons en sorte de la faire briller tant à l’UNamur qu’en dehors de nos murs.
Pietro Zidda
Doyen de la Faculté Economie Management Communication sciencesPo (EMCP)
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